Je me suis agenouillé sur les tatamis de Fukuzen-ji, les poutres en bois de ce temple vieux de plusieurs siècles formaient un cadre autour de ce paysage de carte postale. En premier plan, l’île de Bentenjima, petit îlot rocheux sur lequel on peut apercevoir une pagode se frayer un chemin à travers les arbres. Derrière Bentenjima, l’ile vallonnée et luxuriante de Sensujima. Et tout autour de ces deux îles, la mer intérieure de Seto, étincelant sous les rayons du soleil. Au-dessus des poutres du temple, une calligraphie japonaise et accrochée, reprenant une citation décrivant ce lieu : « le plus beau paysage à l’Est de la Corée ».

La célèbre vue de Taichou-rou

Ce panorama est probablement l’image la plus connue de Tomonoura. Ce paysage que l’on peut admirer depuis Taichou-rou a sa place dans les livres d’histoire, et je parle au sens littéral. Le temple de Fukuzen-ji fut construit il y a plus de 300 ans sur une colline surplombant la magnifique mer de Tomonoura. Ce n’est pas le temple lui-même qui fit la réputation de Fukuzen-ji, mais une salle de réception construite à côté du bâtiment principal et qui porte le nom de Taichou-rou.

En 1711, un diplomate coréen du nom de Lee Bang Eun séjourna à Tomonoura durant un voyage dans la région de Setouchi et une réception lui fut organisée dans le temple de Fukuzen-ji. Alors qu’il admirait l’incroyable juxtaposition des îles de Bentenjima et de Sensujima au milieu de l’immense étendue bleu de la mer intérieure de Seto, encadrée par les murs de Taichou-rou, il fit cette célèbre remarque qui est aujourd’hui immortalisée par une calligraphie sur bois suspendue au-dessus du paysage. Les mots que prononcèrent Eun étaient peut-être légèrement exagérés, mais on trouve dans ce paysage une splendeur indéniable. Lorsqu’on se retrouve devant on a l’impression d’être face à une peinture, dans laquelle l’artiste aurait condensé tout ce qu’il y a de plus beau dans la région de Setouchi.

Découvrir la calligraphie de Sutra Bouddhistes

J’ai pris tout mon temps pour admirer le paysage, mais le temple de Fukuzen-ji propose également à ses visiteurs de faire une expérience unique en son genre. Les sutras sont des aphorismes religieux qui renferment les enseignements bouddhistes. Lors des cérémonies religieuses les sutras sont souvent répétés de manière à se transformer en chant religieux. A Fukuzen-ji, vous pourrez apprendre la calligraphie de sutras en payant 1000 yens en plus des 200 yens demandés pour accéder au Taichou-rou.

Quand je me suis rendu à la réception et que j’ai demandé une initiation de calligraphie de sutras, on me demanda si je souhaitais une séance courte ou longue. Etant complètement novice en pratique bouddhistes et avec des connaissances très limitées en calligraphie japonaise, j’ai décidé d’opter pour la version courte qui semblait mieux me convenir. On me mena jusqu’à une pièce privée à côté de Taichou-rou. Bien qu’à quelques mètres seulement de la vue à couper le souffle de Taichou-rou, le panorama offert par cette pièce ne correspondait déjà plus à la description qu’en avait faite Lee Bang. Toutefois, lorsque je pris place derrière l’une des nombreuses tables de la salle, j’ai pu apercevoir à nouveau la pagode de Bentenjima, les reliefs vallonnés luxuriants de Sensujima et les eaux bleues de la mer de Tomonoura.

Comme indiqué sur la feuille que mon professeur me tendait, je récitais à haute voix certains des passages écrits sur la page, puis j’entrepris de dessiner les caractères de la dernière phrase à l’aide d’un pinceau de calligraphie. Les visiteurs qui choisissent la version longue de l’initiation écrivent le passage en entier au lieu de se contenter de la dernière phrase. Je dirais que quelques connaissances en japonais aident à apprécier cette initiation, mais en même temps les sutras furent écrits il y a longtemps, et tout comme le vieux français qui n’est plus parlé aujourd’hui et qui peut être difficile à comprendre, le japonais utilisé dans ces sutras est loin du japonais moderne. Heureusement, les lignes des kanjis étaient toutes tracées en gris clair sur la feuille. Il suffit de repasser sur les lignes. J’ai quand même été capable de me perdre un instant alors que je me concentrais sur les lignes et les mouvements répétitifs de mon pinceau de calligraphie. Quand j’eu terminé, j’ai levé les yeux et admiré une fois encore, en silence, le paysage stupéfiant de Fukuzen-ji.


Fukuzen-ji Temple
Adresse/ 2 Tomo, Tomo-cho, Fukuyama-shi, Hiroshima
Tél./ +81-84-982-2705
Horaires d’ouverture/ 8h00 – 17h00. Ouvert toute l’année
Prix/ 200 yen (frais d’entrée au Taichou-rou). 1 000 yen (initiation à la calligraphie de sutras).
Parking/ Non

Auteur : Andrew Deck
Traduit de l’anglais par Joachim Ducos