Le rituel shintoïste Otebi Shinji – Une procession autour d’une torche géante

Lorsque, durant la soirée qui précède le second dimanche de juillet, se tient le festival d’Otebi Shinji, la ville de Tomonoura se transforme en une véritable mer ardente.

La cérémonie shinto Otebi Shinji est un rituel de purification qui a lieu le 4 juin de l’ancien calendrier, en face du Mikoshi Togyo de Susanoo no Mikoto, la divinité du palais de Gion qui se trouve dans l’actuel sanctuaire de Nunakuma. Tous les ans, les personnes qui assistent au festival viennent prier pour rester en bonne santé et chasser le mauvais sort.

L’Otebi est une sorte de torche géante de 4,5 mètres de long et pesant plus de 200 kilos, construite à partir du bois d’arbres sacrés appelés « Muronoki » dont les morceaux sont attachés les uns aux autres avec du bambou vert. La flamme de l’Otebi est elle-même sacrée, allumée à partir des étincelles d’un silex. Un groupe d’Ujiko (des porteurs) transporte l’immense torche le long d’un large escalier de pierre. Le feu brulant de ce festival vous transportera dans le temps, à l’époque lointaine de ses origines sacrées.

L’arrivée de l’Otebi aux portes du sanctuaire annonce le début du grand festival du feu, qui se poursuit jusque tard dans la nuit.

Les habitants des environs viennent allumer des torches plus petites dans les trois principaux foyers et ramènent un peu de ce feu sacré pour purifier leurs maisons. Durant la nuit de l’Otebi Shinji, vous verrez donc de petites torches incandescentes parcourir les rues de la ville, qui se pare alors de mille feux, comme si les étoiles étaient tombées du ciel.

Si vous pouviez observer la scène depuis le ciel, vous auriez l’impression d’assister à une chorégraphie spectaculaire réalisée par des lucioles.

鞆町 平地区代表<br>表 章範さん、坂本 弘さん

Sanctuaire Nunakuma
Prêtre Shigenori OKU

Un rituel de purification effectué avant de porter le mikoshi de Susanoo no Mikoto

« Le rituel de l’Otebi Shinji fait partie de l’un des plus grands festivals du feu du Japon. C’est un rite de purification effectué avant de porter le mikoshi de Susanoo no Mikoto, la divinité du palais de Gion (actuel sanctuaire de Nunakuma), pour le festival d’été. Son origine demeure inconnue, mais, en se basant sur une plaque relative au mikoshi qui se trouve au sanctuaire, on suppose que le mikoshi était déjà porté à l’époque de Kamakura (1185-1333).

L’Otebi Shinji a lieu la nuit précédant le deuxième dimanche de juillet. Les porteurs de la torche devant l’autel se vêtissent de blanc et se purifient en se baignant dans la mer. À 18 heures, les enfants de l’école primaire locale font résonner pendant une trentaine de minutes l’ichiban-daiko (premier tambour) pour annoncer le début des festivités dans l’enceinte du sanctuaire. Puis, à 19 heures, on entend le niban-daiko (deuxième tambour), suivi du sanban-daiko (troisième tambour) à 20 heures, et le festival peut enfin commencer. Du poulpe et du concombre est donné en offrande, les prières sont chantées et la torche est transportée jusqu’au feu brûlant devant l’autel.

L’offrande de poulpe et de concombre (originellement du concombre rayé shimauri) n’est pas anodine. En effet, la coupe du concombre est censée rappeler l’emblème du sanctuaire. Historiquement, couper un concombre était donc même considéré comme tabou. Lors du rituel, les porteurs et autres participants avaient pour coutume de ne pas manger de concombre par peur d’offenser les dieux, et cette tradition existe encore aujourd’hui dans certains quartiers de la ville. Cependant, au sanctuaire de Nunakuma, les fidèles ont eux pour habitude de manger du concombre et du poulpe devant l’autel. Consommer ces aliments permet de recevoir la force de la divinité et on dit que le poulpe permettrait notamment d’absorber encore davantage de force grâce à la puissance de ses ventouses.

L’Otebi Shinji auquel assistent les visiteurs est le spectacle des 14 hommes habillés de blanc qui dévalent un large escalier de pierre en portant une torche géante. Ils déplacent le feu sacré jusqu’à cette torche longue de 4,5 mètres pesant plus de 200 kilos qui est conservée du côté sud de la porte Zuishinmon, puis ils remontent l’escalier de pierre en courant. Ensuite, les fidèles du sanctuaire qui habitent dans le quartier en charge des festivités cette année-là portent trois torches enflammées (dénommées « celle de devant », « celle du milieu » et « celle de derrière ») vers le sanctuaire.

Quand la torche de devant est posée devant le lieu de prière, le mikoshi est sorti de son entrepôt et la torche est donnée en offrande au sanctuaire. La torche du milieu et celle de derrière sont elles aussi tour à tour offertes au mikoshi. Par la suite, la torche est à nouveau portée d’un bout à l’autre du sanctuaire, sans oublier un seul recoin, puis est ramenée à son origine avant une purification qui marque la fin de cette phase du rituel. Les visiteurs venus prier ramènent un peu du feu sacré chez eux à l’aide d’une petite torche et prient pour la sérénité dans leur foyer. »

J’aimerais que l’on s’intéresse davantage au sens et aux origines des festivals pour comprendre leur véritable nature.

« Le rituel de l’Otebi Shinji fascine par sa vivacité et son héroïsme, mais j’aimerais que le sens et les origines d’un tel rite soient plus connus. Il est évidemment essentiel que les porteurs et les spectateurs s’amusent lors de cet événement, mais il faut savoir que ce n’est pas une fête où l’on brûle simplement une grosse bûche pour se divertir, c’est un rituel réalisé avant le passage de mikoshi pour purifier le chemin emprunté par la divinité. L’opinion que les gens se font de cet événement devrait changer une fois qu’ils en connaissent le vrai sens.
Les rites et les festivals ne peuvent pas être perpétués à l’aide d’un manuel pratique. Un amateur ne peut pas porter la torche géante, ni maîtriser les flammes. Le déroulement de la journée du festival nécessite des préparations qui prennent un temps incroyable.
Le bois qui va servir à fabriquer la torche doit en outre être affiné pendant deux à trois années après son arrivée. Le pin est ensuite taillé aux alentours du mois de mai, cerclé de bambou et renforcé avec de la corde nouée pour ainsi fabriquer toutes les torches. Au mois de juillet ont lieu d’autres préparatifs, comme l’installation d’échafaudages à l’endroit où la torche est conservée.
J’aimerais que vous disiez aux fidèles du sanctuaire et à tous les habitants du quartier que la transmission manuelle et orale de ces traditions est primordiale pour que les générations futures apprécient cet événement à sa juste valeur. »

Le sanctuaire de Nunakuma, la petite Gion qui protège la ville et la baie de Tomonoura

Le sanctuaire de Nunakuma est le plus emblématique des sanctuaires de Tomonoura, c’est pourquoi les habitants lui donnent le surnom de « Gion-san » ou « Gyon-san ». Durant l’ère Meiji, le sanctuaire de Watasu, consacré à Owatatsumi no Mikoto (une des divinités shinto de la mer) fut combiné au Gion-sha, un autre sanctuaire consacré à Susano no Mikoto, l’une des trois divinités les plus importantes du shintoïsme.

Dans l’enceinte du sanctuaire, on trouve aussi une scène de théâtre nô, créée par Hideyoshi Toyotomi. À l’origine, cette scène se trouvait dans dans le château de Fushimi à Kyoto. Mais lorsque le château fut démantelé, Hidetada Tokugawa la transmit à Katsunari Mizuno, l’un des propriétaires du château de Fukuyama, qui en fit finalement don au Tomonotsu Gion Sha (l’actuel sanctuaire de Nunakuma) dans les années 1650.

À l’époque, la scène était plutôt compacte et pouvait se monter et se démonter facilement pour être déplacée à divers endroits. Aujourd’hui en revanche, elle est installée de manière permanente, avec son toit, ses murs bardés de bois, sa loge, sa pièce couverte de miroirs et son pont suspendu. En 1953, elle fut inscrite au Patrimoine culturel du Japon, et aujourd’hui encore des spectacles de nô se tiennent sur ses planches.

De plus, le deuxième torii du sanctuaire est inscrit au Patrimoine culturel de la Préfecture d’Hiroshima, et la lanterne de pierre au Patrimoine culturel de la ville de Fukuyama.

De multiples événements sont célébrés au sanctuaire de Nunakuma tout au long de l’année.
Chaque année en février a lieu le rituel shinto du tir à l’arc portant le souhait d’une année nouvelle chargée de paix. En juin se tient le rituel du Chinowa Kuguri pour se purifier de ses péchés. En juillet, place au rituel d’Otebi Shinji où une torche géante est transportée en haut d’un escalier de pierre. En septembre, grâce au festival de l’automne, le plus grand festival de Tomonoura organisé par le sanctuaire de Watasu, c’est tout Tomo qui vit une animation sans pareille avec le rassemblement de visiteurs venus de la ville et d’ailleurs.

Le Rituel shintoïste Otebi Shinji

Lieu Le sanctuaire de Nunakuma
Address 1225 Ushiroji, Tomo-cho, Fukuyama-shi, Hiroshima
Date La nuit précédent le second dimanche de juillet
Tél. +81-84-982-2050(Sanctuaire de Nunakuma)
WEB https://tomo-gionsan.com/